Dessinateur : Inio Asano
Scénariste : Inio Asano
Éditeur : Kana
Collection : Big Kana
Genre : Tranche de vie
Public : Averti
Site officiel : Kana
Prix : 7,45€
Sortie : 20 janvier 2017
Statut de la série : En cours de publication
Sous le ciel obscurcit par la vaste présence du vaisseau extra-terrestre, la vie des tokyoïtes se déroule toujours bon gré mal gré entre les partisans du laisser-aller et ceux qui voudraient bien voir l’armée détruire l’importun engin ainsi que ses occupants. Toutes à leur petit monde, Ôran et Kadode profitent autant que possible de leur insouciance d’ado en ce dernier hiver de leur scolarité. Entre délires absolus et plaisanteries douteuses, elles passent du temps ensemble, même pour réviser les concours, et savourent l’amitié qui les lie depuis toujours. A leur duo se mêlent les copines de lycée Rin, Ai, Kiho et l’ami d’enfance Hiroshi et si chacun prend la vie avec un sourire volontaire, l’ombre persistante sur un avenir incertain ne peut totalement être niée. Ainsi, les incidents relatés par les médias, les rencontres bizarres, les divergences d’opinion quant à la dangerosité des envahisseurs et de la vie à Tokyo, s’invitent dans les conversations, provoquant des heurts, des ruptures et des déceptions…
Après un
premier tome qui frappait fort par sa singularité et la force de son allégorie, ce second volume laisse parfois perplexe sans pour autant abandonner le charme d’une série qui surprend, fait réfléchir et ne connaît pas la langue de bois.
Inio Asano, comme nombre de ses collègues mangakas, incarne l’adage « la plume est plus forte que l’épée ».
En filigrane, on retrouve l’allégorie cynique et vraie, celle d’une société japonaise en perte de repères, abandonnée aux incertitudes après avoir été frappée de plein fouet par une série d’évènements sur lesquels, s’ils devaient se reproduire, elle ne peut espérer avoir un jour le contrôle. Les forces de la nature et de l’atome sont des envahisseurs, non belliqueux par essence mais destructeurs et il semblerait qu’aucune image d’autorité n’ait la clairvoyance ou le courage de prendre les bonnes décisions. A condition qu’elles existent… Revendication pacifiste mais cinglante, Dead Dead Demon’s Dededede Destruction ne ménage ni les mots ni les traits pour le dire.
Incarnations d’une jeunesse bercée d’un confort illusoire que bon nombre de gens pensent à tort aveugle à la réalité, Ôran, Kadode et leurs amis choisissent de vivre le présent. Egoïstes ou résilients ? Qui peut juger… L’avenir est plus incertain que jamais alors pourquoi se gâcher le présent à imaginer l’enfer ? C’est ce qui pousse Ôran à délirer du matin au soir sans pour autant lâcher des yeux ou des oreilles l’actualité de sa ville. C’est elle qui nous guide dans une bonne partie de ce second tome, et sa candeur fait envie. Face à elle, Kiho que l’on avait imaginée futile, se révèle bien plus mature que son petit ami obnubilé par le pessimisme diffusé sur le net par une pseudo vedette qui se prétend maître à penser. Et tandis que son copain l’accuse de ne pas réaliser la dangerosité de la situation, Kiho lui rétorque qu’elle n’attend après personne pour faire sa propre analyse des faits et choisir en conscience.
Subtile critique du règne de la pensée unique, les mots d’Inio Asano font mouche.
Pendant que les responsables politiques et les journalistes débattent du bien fondé de laisser les envahisseurs en paix, d’autres encouragent la recherche à la création de robots de guerre en toute légalité. Ignorant du danger imminent, un extra-terrestre imitant l’apparence d’un jeune homme s’est invité dans le quotidien des japonais. Pour les étudier, trouver leurs points faibles, les comprendre ? Mystère. Mais alors qu’au lendemain de Noël toute la ville sombre dans le noir, une attaque frappe de pleine fouet un vaisseau nouvellement arrivé qui tombe alors vers les habitations…
Seul bémol ici, à force de passer du quotidien des personnages principaux aux discours politisés on perd parfois le fil conducteur du propos souhaité par le mangaka.
Régal pour les yeux, le dessin d’Inio Asano n’est plus à vanter, il existe, point. Personnages au chara-design réaliste et expressif à souhait, dynamisme d’une mise en scène adaptée à la densité du texte, abondance de détails dans la création des décors extérieurs et intérieurs qui évoque les images d’un film tant on y distingue tout, des canettes aux livres en passant par le mobilier, les pavés des rues, les feuilles des arbres, les mèches de cheveux, les touches des claviers…
Bien que son scénario s’éparpille parfois, Dead Dead Demon’s Dededede Destruction déploie un charme tout en finesse et assurance, et la fin de ce 2e tome pourrait bien déclencher une guerre totale !
Points forts :
- Sujet d’actualité traité avec la patte Inio Asano
- Allégorie intelligente qui ne lâche rien
- Personnages réalistes et attachants
- Caractères et psychologie de chaque protagoniste bien construit
- Narration agréable à suivre
- Humour + +
- Style graphique sans égal, typique du mangaka
- Chara-design bien défini
- Expressions faciales révélatrices
- Superbe qualité dans le traitement des arrières plans et décors
- Équilibre parfait personnages/environnements
- Mise en scène + + +
- Édition française sans défaut
Points faibles :
- La densité du texte et la variété des points de vue font que le scénario s’éparpille un peu
Verdict : Un Très Bon Tome !!!