Dessinateur : Ayako Noda
Scénariste : Ayako Noda
Éditeur : Casterman
Collection : Sakka
Genre : Thriller, Suspense
Public : Public averti
Site officiel : Aucun
Sortie : 30 mars 2016
Prix : 7,95€
Statut de la série : Terminée en 2 tomes
Pour leur épargner le regard des lecteurs, Uchu a fui son frère et ses amis afin de se rendre directement dans une version dessinée du lieu de vie de leur créatrice. La mangaka semble avoir ainsi dessiné une réplique de son environnement quotidien uniquement pour accueillir son héros. Elle-même est là, à ses côtés, ils parlent, échangent, et Uchu tente de comprendre quel sera leur avenir à tous lorsque leur créatrice décidera que leur histoire doit prendre fin. Une question vitale demeure : Qui décide des actions de l’autre ? Est-ce la mangaka qui l’a fait venir à elle ou bien Uchu a-t-il agi de son propre chef et forcé sa créatrice à modifier son dessin ? Existe-t-il un moyen pour influencer la mangaka et faire en sorte que tous ces personnages d’encre et de papier ne disparaissent pas du jour au lendemain à la fin de dernier chapitre ?
Ayako Noda a parfaitement planifié ses deux tomes. Dans le premier, on découvrait un manga vu de l’intérieur, plus encore à travers les pensées mêmes de ses personnages réalisant qu’ils sont observés, qu’ils peuvent lire des mots apparaissant au-dessus de leurs têtes… Mais si certains personnages se faisaient plus ou moins bien au regard omniprésent des lecteurs qui violaient leur intimité et leur vie, d’autres le refusait si violemment qu’ils semblaient proches de la folie.
Dans ce second et dernier tome, la mangaka montre le point de vue de l’artiste qu’elle est, le processus créatif qui parfois n’aboutit pas, les obligations dévolues au fait de travailler pour un éditeur et selon les exigences de celui-ci et du public qui décident à sa place du nombre de chapitres à réaliser, de la durée de vie de son histoire et donc de ses personnages, ses créations. Sans fard, et à travers le personnage de la dessinatrice d’Uchu et ses camarades, elle livre son amour pour ses créations, même celles appartenant à des essais qui ne furent jamais retenus pour devenir un manga publié, de l’acharnement qu’il faut pour donner vie à des êtres de fiction, les modeler, les mener au cœur d’un récit qui, fatalement devra prendre fin et les voir disparaître. L’espoir de l’artiste est alors que si leurs aventures se terminent, tous vivent encore et peut-être pour toujours dans le cœur et la mémoire des lecteurs, d’autant que le lien qui unit la mangaka à son lectorat n’existe qu’à travers ces personnages de papier.
Uchu est un bon héros, il comprend sa situation avant les autres, leur en fait la révélation, assume son rôle jusqu’à soutenir sa créatrice et l’influencer quand cela est nécessaire. Tous les personnages secondaires font avancer le récit, décident des tournants de l’histoire, la font alterner entre romance, suspense, mystères, humour…
Atypique à souhait Le Monde Selon Uchu prend un intéressant contre-pied d’un titre tel que Bakuman qui nous montre la vie d’un mangaka au quotidien. Ayako Noda passe outre les aspects techniques et pratiques de son métier pour nous inviter à explorer ce qui occupe ses pensées, sa conscience et son cœur lorsqu’elle dessine et écrit une histoire. Les subtilités sont nombreuses : son amour pour ses personnages, la façon dont elle les travaille, les affirme comme une partie d’elle-même et traduit sa fierté de les voir conquérir le cœur du public, comme une mère.
Points forts :
- Une autre vision du métier de mangaka, intimiste et très sincère
- Technique narrative atypique et réussie
- Personnages sympathiques et attachants
- Propos du récit très complet et accrocheur
- Œuvre sensible
- Humour
- Suspense
- Esthétique particulière centrée sur la psychologie des protagonistes donc expressive
- Dessin réaliste
- Chara-design et décors soignés
- Mise en scène qui se plie aux variations de tons : comédie, drame, suspense, réflexions…
- Édition française de qualité
Points faibles :
Verdict : Un Excellent Tome !!!